lundi 24 août 2009

Le feu

Il est ici question d'une leçon et d'une constatation.
Un soir d'été. La fin d'un bel été.
J'étais là, dans mon bain, songeant aux événements de la soirée. La lumière tamisée donnait un aspect romantique aux carreaux de céramique des murs. Je pouvais y voir deux visages se donnant un baiser. Enfin, avec une bonne imagination, un carrelage de céramique aux motifs de marbre peut receler des trésors d'images. Un de ces soirs où on se dit que tout est beau malgré tout, qu'il faut affronter la vie tête baissée, mais que finalement on décide d'y foncer, mais en regardant droit devant. C'est fou ce qu'on peut penser intrépide à la chaleur d'un feu dans la noirceur de la nuit.
Je regardais fixement le mur. On aurait réellement dit un vieux couple de Français qui s'embrassait sur chaque tuile. Toutes les tuiles. L'eau était un peu trop froide. Le feu avait lui peut-être été un peu trop chaud...

Des brindilles. Il y avait eu des brindilles. Beaucoup de minutie et timidement un feu. Des papiers sans importance qui brûlent. Je me suis rendue compte à ce moment là que cet atmosphère prend vie de façon identique chaque fois. C'est comme ça dans un monde où les gens trouvent le feu magique. Ça fait des longs moments de silence paisible. Des réflexions profondes, des chansons qui passent dans dans la tête, des yeux qui collent sur une nuque pour y voir danser le reflet des flammes. Ça fait des beaux moments. Je ne savais plus trop parfois si j'écoutais plus les voix ou les paroles. J'écoute mieux les non-dits. Mais surtout les regards. Parfait alors, tous les ingrédients étaient réunis.

L'esprit vagabondait d'un beau dégât à l'autre. Tentant de trouver remède aux mystères malicieux. Je communiquais bien, tout-à-coup. Mais j'écoutais, surtout. Et tant mieux. Une phrase. Comme un dessin qui apparait dans un motif. Un double sens subliminal. Entre deux belles citations, un soulèvement d'idées, je sortais mes papiers importants et y griffonnait quelques mots. L'auteur prenait vie. Je choisissais bien chaque mot, inscrivait les chuchotements de la muse chirurgicalement. Éloignant peu à peu mes pensées du long combat à venir. Le feu brûlait. Il était fascinant. Le feu. Le penseur de la phrase aussi. J'étais fascinée, tout simplement. Un petit bout de conversation limite scientifique, qui prend forme de crédo pour la guerre. Sorti du contexte, dans les oreilles d'une écrivaine qui veut vivre, sur le bord d'un feu...
"N'essaie pas d'écrire ce qu'est le feu, brûle ta feuille plutôt et constate comme c'est beau!"

Froidement, j'aurais simplement noté la citation et y aurait vu le même sens. Mais c'est difficile le stoïcisme quand LA phrase est dite au bon moment, au bon endroit, par la bonne personne. Le cœur flanche. C'est une belle leçon mais faut pas oublier la constatation. Après avoir écrit ces quelques mots, je trouvai là que c'était une des plus jolies choses que j'ai entendue. Je n'étais plus fascinée. Un mystère était tombé.

L'eau était maintenant beaucoup trop froide. Ma peau sentait le savon "le chat". Un bon vieux savon acheté à Paris qui venait donner une crédibilité olfactive à la scène qui ressemblait à un film Français. Je sorti de l'eau et m'habilla chaudement: j'avais froid. C'était le début de la fin d'un bel été. J'étais heureuse. Avec dans l'âme cette jolie phrase pleine de sens pour moi, et dans le cœur ce que je ne pouvais plus nier. Je me suis couché près du gros chat blanc, sous la couette chaude. Mes cheveux avaient une odeur de feu. Je fermai les yeux sur ce mystère une dernière fois, sachant qu'au matin, il aurait complètement disparu. Fini les questions sans réponses, c'était si simple au fond. Je l'aimais.Pour rien. Je l'aimais simplement.